Marie de Gournay

Claude m’a récemment demandé pourquoi j’utilisais le mot « autrice » (au lieu d’« auteure », plus courant au Québec et dans le reste du Canada français). Le féminin de traducteur est traductrice. On écrit aussi une directrice, une agricultrice, une oratrice…

Alors pourquoi pas une « autrice »?

Selon les règles de formation des féminins, c’est bien « autrice » (du latin auctrix) qu’il conviendrait d’utiliser comme féminin d’auteur. Aurore Evain consacre à ce mot un essai très intéressant, qui en fait ressortir toute la valeur subversive. Alors, je m’inscris dans la foulée de féministes comme Marie de Romieu et Marie de Gournay en choisissant ce « féminin si peu discret ».  D’ailleurs, « autrice » figure depuis 1996 dans le Petit Robert à l’entrée « auteur ».

Je cite en terminant Mme Evain :

Enfin et surtout, ce féminin, […] a désigné bon nombre de pionnières qui se sont risquées dans des métiers de l’écrit jusqu’alors fermés aux femmes, comme le théâtre, la rhétorique, le journalisme, la lexicographie, etc. Pour conclure, l’histoire du féminin autrice illustre la nécessité de redonner une « épaisseur historique » au débat sur la féminisation, afin, comme vient nous le rappeler l’un de ses défenseurs, Alain Rey, de se réapproprier « une langue bien vivante, que l’on peut d’autant mieux défendre que l’on connaît son histoire ».

Catégorie:
La voie de l'écriture, Périphérie
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Joindre la conversation 12 commentaires

  1. Depuis que j’ai vu ce mot sur votre blogue, j’ai fouillé un peu. Tout le monde a l’air de s’entendre que l’emploi est assez rare. Au Québec, ma bible est le Multidictionnaire de Marie Eva de Villers et l’office de la langue française. Contente donc de connaître vos raisons – très justifiées, mais permettez que je continue à utiliser auteure. Je reste ouverte tout de même à un changement s’il survient un jour.

  2. Non à « auteure », « défenseure », etc. Oui à « autrice ». Même si personnellement, je préfère utiliser « auteuse » et « défenseuse », car « monteuse », « batteuse », « menteuse » et « danseuse », « liseuse » et « penseuse ».

  3. En matière de féminisation, l’usage est loin d’être fixé. Différents espaces francophones et différentes gens privilégient différentes formes. Je me réjouis de tout ce mouvement, de cette inventivité langagière. Si le sujet vous intéresse, la Banque de dépannage linguistique de l’Office québécois de la langue française contient une fiche qui résume bien le mode de formation des féminins en français : http://66.46.185.79/bdl/gabarit_bdl.asp?t1=1&id=3943.

  4. C’est un billet intéressant et de bonnes raisons d’utiliser ce mot. Personnellement, il m’accroche les oreilles, alors un peu comme ClaudeL, je préfère utiliser « auteure ».

  5. Justement, ce mot, je l’aime en partie parce qu’il accroche les oreilles, parce qu’il s’entend… Tout comme dire « la ministre » et « la sénatrice », ça accrochait les oreilles au début!

  6. […] j’ai écrit  Autrice, plaît-il?, je ne me doutais pas que, des mois plus tard, ce billet continuerait à figurer parmi les plus […]

  7. Correcteur, correctrice; acteur, actrice; auteur, autrice, etc. Les féminins en -eure sont des exceptions. Un nom seulement se féminise en -eure : prieur/prieure. Et cinq ou six adjectifs, dont meilleure et supérieure.

  8. […] Vous avez particulièrement aimé « Ma Kobo et moi [1] », consacré au livrel; toutefois, « Autrice, plaît-il » et « Alchimie » restent parmi vos billets favoris. Ce dernier est aussi l’un de mes […]

  9. […] à propos de femmes (“Marie Darrieussecq est un auteur contemporain”). Le mot autrice existe, on le trouve employé dès le XVIIème siècle; voir la section “Féminisation” […]

  10. Avant de chercher à féminiser à tout prix, on ferait mieux d’apprendre aux nouvelles générations l’accord des participes passés dont, malheureusement, le féminin est de plus en plus souvent escamoté que ce soit verbalement ou par écrit

  11. […] que bon nombre de billets continuent à être lus longtemps après leur publication, notamment Autrice, plaît-il? Tout en étant moins «travaillés» que mes écrits romanesques, ces billets sont quand même […]

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