Il y a quelques semaines, Claude Lamarche a fait allusion dans un commentaire au temps que le blogue peut voler à l’écriture (voir mon billet du 31 janvier 2011, Les moyens et la volonté). Venise, citant Maxime Roussy, compare même le blogue à une bête à nourrir.
De fait, si on n’y prend garde, le blogue peut dérober du temps à d’autres écritures. Mais il peut, inversement, s’avérer libérateur. Car, on peut dégourdir sa plume sur le blogue, s’y livrer à des échappées bénéfiques, cultiver une plus grande spontanéité…
Quand La Roseraie des Transformeurs sera publié, combien de fois aurai-je relu chaque passage? Quatre, sept, dix, douze fois? Je relis les entrées du blogue deux ou trois fois, rarement plus (à moins qu’elles ne soient très complexes). Ma censeuse intérieure a moins le temps de faire son œuvre; elle apprend ainsi le lâcher-prise. Ma prose romanesque étoufferait (encore) dans sa poigne kadhafienne ne serait-ce de ces précieuses leçons… L’asepsie de la langue bureaucratique, que je pratique quotidiennement pour gagner ma croûte et qui tend conséquemment à être mon mode de communication « par défaut », l’achèverait. Ce qui resterait ne serait qu’une bouillie d’approximations.
Donc, pour mater ma censeuse, je blogue et je tiens un journal. Pour combattre l’asepsie bureaucratique, j’ajoute à ce régime une dose de poésie (un remède dont Envie d’écrire soulignait récemment les vertues).
Ci-dessus : Tête de Gorgone – Louvre, détail de la cheminée A,
dessin de Louis-Pierre Baltard (1803), depuis Gallica.
Si ton blogue est le reflet d’une écriture moins travaillée que ton roman, qu’est-ce que ce sera! Parce que même dans tes billets, on peut dire que ton écriture est soignée.