Ma mère le répétait souvent. Sûrement qu’elle l’avait appris de ma grand-mère. D’ailleurs, il y a fort à parier que votre propre mère vous a servi le même conseil : « Il ne faut jamais dire “Fontaine, je ne boirai pas de ton eau!” »
Quand les livrels – les livres numériques – ont fait leur apparition sur le marché, je ne pouvais pas m’imaginer troquer le papier contre l’encre électronique. Mes expériences de lecture sur l’écran de l’ordinateur me confortaient dans cette idée. J’étais néanmoins curieuse. D’autant que, dans les autobus d’Ottawa, je voyais de plus en plus de liseuses (la capitale canadienne est une ville plutôt aisée, qui aime la technologie). Je me suis dit qu’en 2011, une autrice ne pouvait pas fermer les yeux sur la mutation de l’écrit en train de s’opérer.
Par un bel après-midi d’automne, je me promenais sur la rue Sparks, agréable rue piétonne à quelques foulées du Parlement. Je me suis arrêtée devant l’étal de soldes de la librairie Coles. For One More Day de Mitch Albom a attiré mon attention. Moins de 7 $. Pourquoi pas? J’avais adoré la fable The Five People You Meet in Heaven.
Je suis entrée pour payer mon livre. Le magasin était désert. Devant le présentoir de liseuses Kobo, une jeune vendeuse m’a offert son aide. J’ai décidé d’en profiter pour lui poser quelques questions sur l’appareil que j’avais reluqué à quelques reprises chez Chapters. Elle connaissait bien son produit, la demoiselle. La seule question à laquelle elle n’a pu répondre a été la résistance aux chocs. Ma curiosité l’a emporté. J’ai acheté. En 2011, une autrice se doit de comprendre l’industrie du livre, ce qui comprend le livre numérique, me suis-je dit pour justifier la dépense.
Rentrée chez moi, j’ai chargé la liseuse et téléchargé dans sa bibliothèque quelques titres gratuits et payants. Reprenant quelques heures plus tard l’autobus, c’est ma Kobo tactile toute neuve que j’ai emportée au lieu d’un livre papier.
Et le verdict? J’adore.
Kobo, dont l’interface est disponible en français, offre un grand confort de lecture, même au soleil (en fait, au soleil, je dirais que la Kobo est supérieure au papier, qui peut causer un certain éblouissement lorsqu’il est très blanc). L’appareil est léger et convivial. Il permet de surligner des passages — mais, hélas! pas de les annoter. On peut cependant gribouiller des notes à part, au moyen du carnet de croquis (une fonction encore au stade expérimental, qui se trouve dans la section des suppléments). Le dictionnaire intégré n’existe pas en français pour l’instant, mais c’est une des langues devant être ajoutées bientôt. Kobo, au contraire d’autres liseuses, accepte plusieurs formats, dont les fichiers PDF (les fonctionnalités sont dans ce cas limitées). Même quand on ne télécharge pas à partir de la boutique Kobo, l’ajout de livrels est très simple. Par exemple, j’ai téléchargé du site Livres pour tous La Peste de Camus, puis je l’ai copié sur ma Kobo de la même manière que je copie des fichiers d’un répertoire à l’autre sur mon ordinateur.
Claude Lamarche, une écrivaine de la Petite-Nation (juste au nord d’Ottawa), bloguait la semaine dernière sur la satisfaction qu’elle a éprouvée en touchant les premiers exemplaires imprimés de son tout nouveau roman. Elle affirmait qu’un livre numérique ne lui aurait pas procuré la même satisfaction. Je me suis demandé si moi, nouvelle adepte du livrel, je penserai la même chose quand paraîtra La roseraie des transformeurs. En d’autres mots, jusqu’où ira ma tolérance pour la dématérialisation?
À suivre.
Remarque :
Depuis que j’ai écrit ce billet, les choses ont déjà beaucoup évolué dans l’univers Kobo. Vous pouvez facilement repérer les autres billets que j’y consacre en cliquant sur le mot-clé (tag) « Kobo » ci-dessous.
Photos : Le tome 1 du Seigneur des anneaux (format poche) à côté de ma Kobo; l’interface française de la liseuse Kobo.
Fait toujours bizarre de voir mon nom (et même mon pseudonyme).
Tant que tout ne sera pas en français que je ne pourrai pas emprunter des livres numériques comme on emprunte des livres à la bibliothèque, je ne serai adepte d’aucune liseuse. C’est bien beau relire les classiques parce qu’ils sont gratuits, mais j’aimerais bien lire des livres québécois de mes contemporains.
La bibliothèque d’Ottawa commence à offrir des livrels. L’offre est encore limitée, mais les bibliothécaires sont, d’après ce que je constate, bien conscientes et conscients de l’importance du virage numérique. Et, de plus en plus, il est possible d’acheter les livres québécois contemporains en format numérique. J’en parlerai dans « Ma Kobo et moi, partie 2 ».
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