Une très belle phrase de Bertrand Gervais m’a happée l’automne dernier :

Le passé est fait de cordes qui tendent à se nouer dans l’obscurité.

Les nœuds qui se forment là, dans l’obscurité, où notre regard ne peut pénétrer, à la longue se serrent et créent de terribles enchevêtrements. Vient un temps où il faut les défaire pour continuer à tisser notre vie.

Je me suis prise — une fois de plus! — dans un tel enchevêtrement. Les émotions que j’avais réprimées faute de ne pouvoir les exprimer ont noué mes muscles. J’ai commencé à tirer sur les cordes une par une. Les nœuds, graduellement, se relâchent.

Cela prend de la patience.

Cela prend du courage — un mot qui m’a longtemps hérissée!

Dans mon journal, je dialogue avec le passé. Je récris les événements et leurs actrices sous de nouveaux angles pour prendre du recul, mettre au jour les interactions souterraines et les torrents d’émotions que j’ai embouteillés.

Je décapsule et laisse couler.

Je ne suis plus la petite fille brisée qui a tant fait pleurer sa mère. Certes, cette petite fille vit encore (avec ses frustrations et ses vulnérabilités) dans le cœur de la femme que je suis devenue. Elle y vivra toujours. Mais quand j’ai plongé dans le regard de mon père hier, j’ai été prise de vertige, parce que, dans ce regard, je me suis vue géante.

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La substantifique moelle
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