L’hiver, je vis comme mes aïeules, me dis-je en écoutant ronronner la fournaise. Comme elles, je suis le rythme dicté par les éléments. Il neige? Je reste tapie au chaud, coupée du monde jusqu’à ce que le chasse-neige, la souffleuse et les fondants aient fait leur œuvre. Les échos de la civilisation voyagent tout de même jusqu’à moi par la fibre optique. De temps en temps, j’ai même de la visite : le facteur est le plus constant. Il a souvent un livre ou un magazine pour moi. L’autre jour, il m’a porté une missive de ma vieille « maîtresse d’école », qui vit toujours; une dame formidable qui m’a enseigné pendant six ans : elle m’a initiée à la littérature en me faisant lire Félix Leclerc. Qui aurait alors pu dire que je finirais littéraire…
Dans ma maison sous les monceaux de flocons blancs, je travaille donc de plus belle sur ce troisième roman qu’on me réclame. Parfois, je n’arrive qu’à saupoudrer quelques mots sur la page; d’autres jours, c’est une véritable tempête. Je dois aussi accepter ces rythmes-là.