Il n’y a plus assez de mois pour les causes qu’on cherche à nous faire endosser.

Mai est le Mois de l’arbre et des forêts; il est aussi le mois de la santé visuelle et le mois de sensibilisation à la sclérose en plaques, entre autres. Je n’ai pas trouvé de liste définitive, mais il semble y avoir, pour chaque mois du calendrier, au moins une douzaine de causes s’en réclamant.

Il y a de quoi développer une « causite » aigüe.

Bien sûr, ces causes sont toutes méritoires, mais la multiplication des campagnes de sensibilisation n’a-t-elle pas l’effet opposé de celui qu’on vise? N’entraîne-t-elle pas une désensibilisation du public?

Dans les médias sociaux, sur la place publique, dans nos lieux de travail et ailleurs, partout, on joue le même jeu : c’est à qui criera le plus fort ou fera le plus pitié. On essaie de tirer nos cordes sensibles, bien sûr, de nous avoir par les sentiments puisque les faits, eux, ne suffisent pas à nous faire changer d’avis*.

« Chacun veut sa lettre », me disait récemment une amie à propos du sigle expansif de la diversité sexuelle qui, de LGBT, est devenu LGBTQ, LGBTQ+, puis LGBTQIA+.

Le morcellement de notre attention s’accompagne d’un morcellement de la société (tendance que favorisent les médias sociaux parce qu’ils nous enferment dans des catégories). Chacune réclame sa place au soleil. Sauf qu’à tirer chacun et chacune la couverture de notre bord, nous annulons nos efforts et rien ne bouge — pis encore :  ceux qui arrivent à progresser, ce sont les extrémistes comme ceux qu’on trouve dans la « manosphère** ».

Bien sûr, pour se libérer de l’autoritarisme (religieux, politique ou autre), il fallait commencer par reconnaître et valoriser les différences. Maintenant, il nous faut apprendre à harmoniser ces différences, passer de l’individualisme à la solidarité; il nous faut apprendre la paix, telle que définie dans la Déclaration de paix des Haudenosaunee :

[…] la paix n’est pas seulement une absence de guerre. C’est un effort constant pour maintenir des relations harmonieuses entre tous les peuples, entre un individu et un autre, et entre les êtres humains et les autres créatures qui vivent sur cette planète.

* Nic Ulmi, « Est-il possible de changer d’avis? », Le Devoir, 28 novembre 2016.
** Josée Blanchet, « La manosphère en calvaire », Le Devoir, 4 mai 2018.
Catégorie:
Citations, Sur la corde raide
Étiquettes :
, ,

Joindre la conversation 1 commentaire

  1. Et c’est sans parler de la littérature.
    Même les meilleurs romans, les romans primés doivent embrasser-défendre-approfondir une cause: tel problème environnemental, telle guerre et ses héros. Toujours un contexte social ou historique sinon, c’est banal, inintéressant.

Les commentaires sont fermés.

%d blogueurs aiment cette page :