
J’ai une tête à chapeaux, il paraît.
J’en porte d’ailleurs beaucoup : relationniste, responsable-marketing, correctrice, commis comptable et j’en passe. Ça vous tente de voir ma collection de chapeaux? En voici quelques-uns…
La traduction
L’autrice doit, comme tout le monde, manger, s’habiller et payer son loyer (ou son hypothèque). À moins d’avoir hérité d’une grande fortune ou, encore, d’avoir uni sa destinée à une ou un mécène richissime, elle devra aussi, fort probablement, exercer un métier alimentaire : on ne devient pas la nouvelle J. K. Rowlings en un jour. Dans mon cas, ce métier est la traduction.
La révision
En plus de traduire, je révise. Linguistique ou bilingue, la révision est une étrange gymnastique intellectuelle. Elle demande à la fois un goût pour les devinettes (afin de déchiffrer les passages obscurs ou traquer les usages rares) et une souplesse d’acrobate (pour s’adapter au style et à la pensée de la personne révisée). La révision m’a appris bien des choses, y compris que le mot « commerce » ne suppose pas toujours un échange d’argent : il peut aussi désigner les « relations que l’on entretient dans la société »*. Et les relations sont la clé en vente.
La vente
Une autrice doit savoir vendre sa salade — pardon, ses textes. Même si elle publie chez un éditeur réputé, elle devra participer à l’effort promotionnel. De nos jours, cela signifie avoir une présence en ligne, comprendre la notion de découvrabilité et le bon usage des mots-clics, voire formuler un plan de communication (après avoir lu un ouvrage du genre Online Marketing for Busy Authors ou 101 trucs pour promouvoir vos romans).
L’autrice a aussi tout avantage à cultiver ses dons oratoires pour charmer les médias et faire des présentations enlevantes. Le but de tout ce cirque : donner aux gens envie de vous lire. Oui, je l’avoue, je rêve d’être invitée à Tout le monde en parle, mais je sais que si j’ai l’air d’une gourde devant la caméra, les téléspectatrices et téléspectateurs ne risquent pas de se précipiter chez leur libraire pour acheter mon dernier livre. Je crois dans la technique des petits pas : j’ai commencé par me dégourdir en participant à des tables rondes et en donnant des ateliers devant quelques collègues (je les remercie d’ailleurs profusément de leur indulgence et de leurs encouragements…).
Les chiffres
La passion des lettres vient souvent avec une aversion pour les chiffres, mais il faut quand même savoir compter : ça aide lorsque vient le moment de préparer une demande de bourse (un processus fastidieux, qui s’étale en général sur plusieurs jours). Je ne suis pas une fan d’Excel, mais je reconnais l’utilité des feuilles de calcul et je me suis aussi résignée à utiliser un logiciel de comptabilité. Parce qu’être autrice en 2020 s’apparente à gérer une entreprise.
Je suis fière de ma collection de chapeaux. Certains sont pragmatiques; d’autres flatteurs. Il y en a que j’aime moins que d’autres, bien sûr, mais quel bonheur de ne pas toujours porter le même!
* Le Petit Robert de la langue française, 2018.
Photo : Marie-Josée Martin arborant son chapeau favori à Toronto, 2019.
Bien dit, comma d’habitude!