Mots savants et inventés

Je baigne dans les mots toute la journée. La langue me fascine. Je l’aime dans sa musicalité comme dans sa précision. Je savoure ces innombrables variations.

La langue peut varier selon le lieu (variation diatopique), selon la classe socio-économique (variation diastratique), selon l’âge (variation diachronique) et selon la situation de communication (variation diaphasique). Toutes ces variations sont simultanées. La langue décrite dans les ouvrages de référence et qui correspond à ce qu’on associe généralement au « bien parler » n’est qu’une dimension de toutes ces variations (la variation diaphasique). Et attendez, on n’a pas tenu compte encore ni de la notion de dialecte, ni de la notion de variété de langue, on n’a pas parlé du degré d’instruction (qui est différent parfois de la classe socio-économique), ni de l’influence de l’écrit. Et on n’a pas non plus parlé de l’humeur du locuteur, de ses goûts, de ses préférences. (1)

En raison de ma formation et de mon cadre de vie (2), j’ai développé une intolérance aux anglicismes (avez-vous remarqué, il n’y a plus de chefs, tout le monde préfère endosser le rôle de leader…). D’autant que le français ne manque pas de ressources pour exprimer le monde. Par exemple, il y a quelques mois, en lisant la définition que Lysiane Gagnon donnait du mot foodie, je lui ai inventé, pour mon seul plaisir, une traduction; j’en ai fait un « expérimangeur » (des mots « expérience » et « mangeur »). L’expérimangeur est en quelque sorte un gastronome superformant :

[il] est du genre à planifier ses itinéraires de voyage exclusivement en fonction des tables étoilées qu’il compte découvrir. Il est capable de prendre l’avion pour aller expressément manger dans un établissement bien placé sur la liste San Pellegrino. (3)

Il y a quelques années, je ne jurais que par les dictionnaires. Je laissais la néologie aux pros… Et puis j’ai entrepris d’écrire un roman un peu trop ambitieux dans lequel je me suis mise à contorsionner la langue — trop ambitieux parce que, par moment, j’ai eu l’impression que mon « cerveau manqu[ait] de dimensions pour être en mesure de conceptualiser tout cela »(4)!

J’ai pris goût à la néologie.

Mon roman m’habite beaucoup ces jours-ci. Au point où les mots inventés qui le peuplent cherchent à s’infiltrer dans d’autres écrits.

MISE À JOUR

L’Office québécois de la langue française a finalement retenu l’équivalent cuisinomane pour foodie.

1. Anne-Marie Beaudoin-Bégin, « La linguistique quantique », Ricochet.
2. En langue bureaucratique, je vis dans une communauté francophone en situation minoritaire.
3. Récits de table d’ici et d’ailleurs, Éditions La Presse, 2014, p. 232.
4. Beaudoin-Bégin, op. cit.

Arrivages récents

Parmi les titres que j’ai reçus récemment, figurent beaucoup de livres sur les plantes et les jardins. Je sais, ça peut sembler étrange au beau milieu de l’hiver, mais je viens tout juste de livrer ma chronique de l’été…

CHRISTENSEN, Andrée. La mémoire de l’aile, roman, Ottawa, Éd. David, 2010.

L’écriture de Mme Christensen est poétique, mystique même. Cliquez sur le titre pour accéder au site de l’éditeur, où il est possible de lire quelques pages du livre.

Le traité Rustica du Jardin : 1000 conseils-clés, Paris, Rustica, 2003.

Il y a mieux. Si vous jardinez, optez pour un ouvrage nord-américain et plus récent.

BOUDASSOU, Bénédicte. Jardins d’inspiration, Paris, Rustica, 2009.

Le livre porte bien son titre. Il nous fait visiter quelques jardins célèbres en France, dont ceux de plusieurs châteaux.  Les photos sont magnifiques, et c’est assez général pour nous inspirer aussi, même si on ne travaille pas avec les mêmes plantes et qu’on n’a pas nécessairement autant d’espace!

BLOT, Nathalie. Bien fleurir en ville, De Vecchi, 2009.

Quelques idées intéressantes pour la composition, mais, comme je le dis toujours, en fait de jardinage, les ouvrages français sont d’une utilité limitée, parce que notre climat est beaucoup plus rigoureux et que nous ne pouvons utiliser les mêmes plantes.

Coffret Les 1001 saveurs qu’il faut avoir goûtées dans sa vie (sous la direction de Frances Case, préfacé par Paul Bocuse) et Les 1001 vins qu’il faut avoir goûtés dans sa vie (sous la direction de Neil Beckett), Trécarré.

Un coffret pour celles et ceux qui ont la curiosité gustative assez poussée. Les photos sont magnifiques, surtout dans Les 1001 vins qu’il faut avoir goûtés dans sa vie. Le volume consacré aux saveurs est en fait une petite encyclopédie des aliments. Chaque entrée comporte une description du goût éclairante, qui ne manque parfois pas d’étonner. Celle du nori dit :

« Le nori est doux, avec seulement un faible goût de mer, car il pousse près des estuaires. Croquant et savoureux, c’est un accompagnement parfait pour la sauce soya et, de manière assez surprenante, le fromage. »

STUPPY, Wlofgang et al. Dans le secret des plantes. Un monde étrange et fascinant, Romain Pages Éditions, 2010.

Voici un beau-livre aux photographies étonnantes, traduit de l’anglais. Le sujet? La reproduction des plantes. À feuilleter avec de jeunes curieuses et curieux.

%d blogueurs aiment cette page :